Journée d’étude – Mathématiques, enseignement et recherche dans le Nord et le Pas-de-Calais (XIXe -XXe siècles), Université d’Artois, 7-8 novembre 2024

Salle des thèses, Faculté Jean Perrin (Plan : https://www.univ-artois.fr/luniversite/venir-luniversite/site-universitaire-de-lens)

Argument. L’objectif de ce colloque est l’exploitation d’archives locales diversifiées pour répondre à des questions concernant la place des mathématiques – enseignement et recherche – dans le Nord et le Pas-de-Calais, et leur articulation avec la société, l’économie et l’industrie, aux XIXe et XXe siècles.

Ce colloque s’inscrit dans une historiographie récente qui discute la place et le rôle des mathématiques à une échelle locale, voire très locale – on pense à l’ouvrage Mathématiques et mathématiciens à Metz paru en 2018 sous la direction d’Olivier Bruneau et de Laurent Rollet ; on pense aussi aux travaux récents de Renaud d’Enfert et Virginie Fonteneau sur l’offre locale d’enseignement. Les récits globalisants, explicatifs des phénomènes de production et diffusion des mathématiques, bien que stimulants et dessinant des schémas généraux, ont tendance à masquer les singularités et les irrégularités de l’histoire ; ils échouent aussi dès qu’il s’agit d’ouvrir la boite noire des processus de fabrication et de circulation des mathématiques, souvent invisibles avec une focale trop grande.

À l’aide d’études de cas ayant pour cible des entreprises, des écoles normales, des institutions d’enseignement supérieur, des laboratoires, etc., ce colloque cherche à contribuer à l’historiographie des pôles mathématiques de province, tout en affinant une méthodologie propre à l’étude des sources locales. De fait, dans le Nord et le Pas de Calais, nombreuses et diverses sont les situations où les mathématiques croisent les histoires des institutions et des groupes sociaux.

Programme

Jeudi 7 novembre

• 13h. Accueil
• 13h30 Thomas Preveraud (Université d’Artois)
• Introduction générale.

1. Offre locale d’enseignement : que nous apprennent les exemples de Metz et Nantes ?

• 13h45 Olivier Bruneau et Laurent Rollet (Université de Lorraine)
  Une offre locale de mathématiques à Metz (1750-1870) : quelles méthodes ? quels enjeux ? quelles limites ?
• 14h30 Jenny Boucard (Université de Nantes)
  D’une faculté de papier à une bibliothèque de béton : les mathématicien·ne·s et leurs ouvrages à l’université de Nantes (1960’-2000’)
• 15h15 Synthèse
  Discutant : Thomas Preveraud

** Pause **

2. Quelles sources explorer dans le Nord et le Pas-de-Calais ?

• 16h Stéphane Lembré (Université de Lille)
  Traces de maths : l’offre locale d’enseignement des mathématiques au prisme des archives, Nord et Pas-de-Calais, XIXe et XXe siècles
• 16h45 Jean-Jacques Flahaut (Université de Lille)
  Une exploration de la collection des documents en mathématiques du Fonds patrimonial des Écoles Normales d’Instituteurs du Nord et du Pas-de-Calais : « Les maths du fonds Pat »
• 17h30 Synthèse
  Discutant : Guillaume Jouve

** Diner du colloque (20h) **

Vendredi 8 novembre

3. Cas d’études dans le Nord et le Pas-de-Calais

• 9h30 Guillaume Jouve (Université d’Artois).
  Titre à préciser
• 10h15 Antonietta Demuro (Université d’Artois)
  La Mécanique des Fluides à Lille : entre politiques nationales et réalités locales dans l’entre-deux-guerres

** Pause **

• 11h15 Thomas Preveraud (Université d’Artois)
  Jalons pour une histoire de l’arrivée d’un enseignement universitaire mathématique dans le bassin minier (1985-1995)
• 12h Synthèse
  Discutante : Jenny Boucard

** Déjeuner du colloque (13h) **

Résumés des communications

OLIVIER BRUNEAU et LAURENT ROLLET (Université de Loraine). Une offre locale de mathématiques à Metz (1750-1870) : quelles méthodes ? quels enjeux ? quelles limites ?

Dans cet exposé nous reviendrons sur les résultats d’un projet de recherche collectif qui visait à explorer et à comprendre l’offre locale en mathématiques dans la ville de Metz sur le temps long. Entre 1750 et 1870, Metz, ville moyenne d’environ 40 000 habitants, a été un pôle significatif pour l’enseignement et les recherche en mathématiques : elle a en effet compté des collèges royaux durant l’Ancien Régime, une école centrale puis un lycée qui hébergea durant la période napoléonienne une faculté des sciences, des écoles municipales (l’école de dessin et l’école industrielle), deux écoles régimentaires et une école d’application du génie et d’artillerie. Tous ces lieux d’enseignement ont contribué, par leurs acteurs, à la constitution d’une offre locale d’enseignement mathématique couvrant tous les niveaux, des plus élémentaires aux plus avancés, l’École d’application de du génie et de l’artillerie étant destinée à former les polytechniciens versés dans ces deux armes. Metz fut par ailleurs le siège d’une académie nationale, héritage d’une Société royale avant la Révolution, qui s’investit pleinement dans la mise en place de cours publics destinés aux ouvriers.

Si on connaît assez bien les parcours messins de certains mathématiciens de renom – Claude Lucien Bergery, Jean Victor Poncelet, Isidore Didion – il restait à explorer, dans une perspective biographique et prosopographique les trajectoires de plus d’une centaine d’acteurs qui, durant cette période, participèrent à la vie mathématique locale.

Nous commencerons par faire un état des lieux des archives que nous avons collectivement exploitées. Nous aborderons les différentes méthodes utilisées allant de la microhistoire à l’étude sur le temps long avec comme fil conducteur, l’ambition de casser la dichotomie local vs global. Nous finirons par énoncer quelques limites ou points aveugles rencontrés lors de cette étude.

JENNY BOUCARD (Université de Nantes). D’une faculté de papier à une bibliothèque de béton : les mathématicien·ne·s et leurs ouvrages à l’université de Nantes (1960’-2000’)

Le travail présenté ici s’inscrit dans le programme Nanthématiques, qui vise à explorer le développement des mathématiques dans la ville de Nantes depuis le second XVIIIe siècle. Ce projet fait écho aux recherches sur les offres locales d’enseignement et vise à établir une histoire locale et sociale des mathématiques pour la région nantaise. Une particularité notable de Nantes est l’absence d’université entre la Révolution française et les années 1960. Ici, je me focaliserai justement sur l’histoire des mathématiques au sein de l’université de Nantes depuis sa re-création.

Créée sur le papier en 1960, la première faculté des sciences de Nantes s’ancre matériellement en 1967 sur le nouveau campus de la Lombarderie. Une communauté de recherche en mathématiques s’est progressivement organisée dans cet environnement local, obtenant en 1981 la reconnaissance officielle par le CNRS du laboratoire de mathématiques, puis un bâtiment complet sur le campus pour héberger les mathématicien·ne·s nantais·e·s quelques années plus tard. En octobre 2000, après des années de négociations, le Centre Régional de Documentation Mathématique a été officiellement inauguré sur le campus nantais.

Dans cet exposé, je m’appuierai sur un travail mené avec Anne-Sandrine Paumier, fondé sur des archives universitaires et une quinzaine d’entretiens effectués entre 2018 et 2022 avec des membres du laboratoire de mathématiques Jean Leray de Nantes. Notre étude vise à analyser comment les mathématicien·nes nantais·es ont œuvré depuis les années 1960 pour développer leurs activités d’enseignement et de recherche en mathématiques et pour être identifiés comme une équipe de recherche en mathématiques à part entière à différentes échelles (locale, régionale, nationale et internationale). Je présenterai la méthodologie développée en fonction de la nature des sources disponibles, les premiers résultats obtenus ainsi que nos perspectives de recherche.

STEPHANE LEMBRÉ (Université de Lille). Traces de maths : l’offre locale d’enseignement des mathématiques au prisme des archives, Nord et Pas-de-Calais, XIXe et XXe siècles

La problématique de l’offre locale d’enseignement permet d’effectuer un pas de côté bénéfique pour l’histoire des disciplines scolaires. Entre autres, il révèle la variété des fonds d’archives, eux-mêmes propices à des approfondissements voire des renouvellements dans les savoirs relatifs aux prescriptions, aux savoirs de référence, aux curricula et aux acteurs qui composent les disciplines scolaires. Dans le cas des mathématiques, en focalisant cette étude sur les enseignements techniques et professionnels, plusieurs exemples de fonds documentaires particulièrement intéressants peuvent être ici présentés, sans prétention à l’exhaustivité mais en mettant en évidence la pluralité des apports pour la connaissance des enseignements mathématiques.

JEAN-JACQUES FLAHAUT (Université de Lille). Une exploration de la collection des documents en mathématiques du Fonds patrimonial des Écoles Normales d’Instituteurs du Nord et du Pas-de-Calais : « Les maths du fonds Pat »

Le Fonds patrimonial des anciennes Écoles Normales d’Instituteurs du Nord et du Pas-de-Calais est composé de collections constituées depuis la création de l’École Normale de Garçons (mai 1834) et celle de Filles (octobre 1845) jusqu’à la création de l’IUFM Nord Pas-de-Calais (1991) : plus de 50 000 ouvrages dans toutes les disciplines de la connaissance, plus de 8 000 manuels scolaires de toutes époques et dans tous domaines, environ 500 planches scolaires.

Ce fonds patrimonial détient quelques 2150 ouvrages en Mathématiques, sur une période de 1862 à 1991 : majoritairement des manuels scolaires, mais aussi des ouvrages destinés à la formation des enseignants, des aspirants au bac, à l’agrégation ou aux classes préparatoires d’écoles d’ingénieur. Une exploration de ce fonds est proposée dans cet exposé, en valorisant des ouvrages sur les mathématiques modernes de Frédérique et Georges Papy, de Nicolas Bourbaki, sur des ouvrages en géométrie de Michel Chasles, ou de René Cluzel, professeur de l’ENNA.

La valorisation de ce fonds sera accrue prochainement en numérisant un segment de la collection de mathématiques, augmentant ainsi la visibilité de la bibliothèque numérique de ce fonds patrimonial.

GUILLAUME JOUVE (Université d’Artois). Titre et résumé à préciser.

ANTONIETTA DEMURO (Université d’Artois). La Mécanique des Fluides à Lille : entre politiques nationales et réalités locales dans l’entre-deux-guerres

Dès le début du XXe siècle, l’essor de l’aviation stimule le développement de l’aérodynamique et de la mécanique des fluides, entraînant la création de laboratoires et de centres d’essais. En France, le ministère de l’Air, fondé en 1928, soutient la recherche en mécanique des fluides, ce qui mène aussi à la création d’instituts à Paris, Lille, Marseille et Toulouse entre 1929 et 1930. Notre exposé retrace l’histoire de l’Institut de mécanique des fluides de Lille (IMFL) de 1929 à 1939, en analysant la manière dont le programme national du ministère de l’Air s’adapte aux particularités locales. En s’appuyant sur les archives de l’ONERA et sur d’autres sources locales, notre présentation examine la genèse et le développement des activités de l’IMFL en lien avec le ministère de l’Air, l’industrie lilloise et les collaborations locales, tout en mettant en lumière le rôle des acteurs clés, y compris ceux en dehors du milieu académique, tels que les techniciens et ingénieurs de l’institut.

THOMAS PREVERAUD (Université d’Artois). Jalons pour une histoire de l’arrivée d’un enseignement universitaire mathématique dans le bassin minier (1985-1995)

La conférence rend compte des résultats préliminaires d’un travail qui explore l’arrivée d’un enseignement supérieur en mathématiques à Lens, à la création de l’université d’Artois au début des années 1990.

Créée pour répondre à des besoins de formation supérieure dans le bassin minier alors que des centaines d’étudiants se rendaient chaque automne à l’université de Lille pour étudier les mathématiques, la faculté des sciences ouvre ses portes en 1991 et rassemble les filières scientifiques. L’ouverture de la faculté résulte plus d’une volonté politique que scientifique ; ainsi différents acteurs locaux et nationaux – maires, conseillers régionaux et généraux, ministres, associations de parents d’élèves – œuvrent dans les années 1980 à la mise en place d’une institution universitaire capable d’offrir une alternative à l’offre locale existante, réduite à un IUT et à quelques classes préparatoires.

La conférence rendra compte de la variété des sources rassemblées pour mener ce projet – correspondances des maires de Lens, Béthune et Liévin, du ministre de l’Éducation, des présidents de région et du département, du premier président de l’université ; archives de l’association des parents d’élèves du bassin minier ; archives orales des enseignants et chercheurs de l’époque ; archives du laboratoire de mathématiques de Lens ; archives de la bibliothèque universitaire ; archives de la Voix du Nord. Nous proposerons ensuite un panorama des lieux, des acteurs et des moments clés de l’histoire de l’implantation d’un enseignement et d’une recherche en mathématiques à Lens (1985-1995)

Contacts

• Antonietta.demuro@univ-lille.fr
• Thomas.preveraud@univ-lille.fr
• Guillaume.jouve@univ-lille.fr
• Rossana.tazzioli@univ-lille.fr

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